“David Boulanger, peintre” par Pascal Bonafoux (Paris, France)
David Boulanger, peintre.
Il commence.
Comme il se doit, c’est par une colère qu’il commence.
Puisque – le faire-part est rabâché depuis des années -, puisque la peinture est morte, c’est à la peinture qu’il a fait le choix d’avoir affaire, c’est avec la peinture qu’il se coltine. Le choix n’a rien d’évident. Faire à […] ans et des poussières un tel choix, pied de nez à une convention, c’est d’emblée passer pour ringard, c’est d’emblée être anachronique. (En tout cas aux yeux des autorités administratives officielles qui exercent leur tutelle sur les arts. Elles n’éprouvent, ne peuvent éprouver que de la condescendance pour qui prétend peindre. Elles n’acceptent et ne peuvent entériner que les preuves qui vérifient leurs certitudes.) Peu lui importe. Il n’a que faire d’être mal vu. Ou pas vu du tout. Parce que, il le sait, ceux qui ne le voient pas, ne voient rien. Parce que, il le sait, la peinture est une exigence dont peu admettent qu’elle soit presque une ascèse.
Il commence.
Il peint. Il veut peindre. La peinture est son souci. Son seul souci. Ce qui implique autant d’humilité que d’audace. Avec les défis et les doutes qui accompagnent l’une et l’autre. Il les assume. Parce qu’il lui a fallu, parce qu’il lui faut sans cesse se donner tous les moyens que requiert la peinture. Nécessité de la lucidité et de l’inconscience. Nécessité de la patience et du culot. D’où les heures passées devant une toile d’un Courbet, d’un Rembrandt, d’un etc., à se demander comment est fichue une ombre, comment se met en place cette transparence, comment…
Il sait que la peinture a dû passer, passe par cette étude qui est déférente et inquiète. Comme il sait que la peinture exige qu’il prenne des risques.
Et il les prend. Ce que cette exposition met en évidence. La première d’un peintre qui s’est donné les moyens d’être le peintre qu’il a fait le choix d’être.
Pascal Bonafoux, Paris, 199-
« Sur les débuts du peintre », Première parution,
Extrait du Catalogue de L’Exposition Inauguration,
Galerie La Cave d’Arts (Louviers, France)
Pascal Bonafoux, né à Paris en 1949, est un écrivain et historien de l’art français.
Auteur de nombreux essais consacrés à l’art et pensionnaire de l’Académie de France à Rome en 1980 et 1981, il collabore à divers journaux et revues. Commissaire d’exposition en France et à l’étranger, il est aussi professeur d’histoire de l’art à l’université Paris VIII.
Il est spécialiste de l’autoportrait. Wikipedia.
Galerie La Cave d’Arts
11 rue du quai
27400 Louviers